Quand je fais le parallèle entre les pratiques minables rappelant tantôt le marché noir bien de chez nous tantôt les requins de la finance mondial sur ce qui n'est à la base qu'un hobby, je constate parfois avec effroi avoir sous-estimé la chose. Saviez-vous que depuis près de 2 ans sévissait depuis les Etats-Unis une agence de notation jugeant de l’état général du jeu vidéo dit de collection: VGA pour Video Game Authority. « Authority» , rien que cela. En effet, contre espèce sonnante et trébuchante, ces experts auto-proclamés se permettent d'attribuer une note à votre exemplaire, ceci le plus souvent afin de mettre en valeur une vente (enfin, surtout le tarif demandé) sur ebay. Une fois noté, l'exemplaire est scellé (!) dans un emballage transparent de leur cru, rappelant étrangement nos blisters dits "rigides" (tiens donc). Sont évalués l'état de la boîte, de l'étiquette de la cartouche, du blister le cas échéant etc... Mazette, blister un jeu sous blister, où s'arrêteront-ils ? Mettons de côté l'aspect spéculatif, cette graduation n'a alors comme seules utilités que de se toucher sur la valeur de sa collection et de pouvoir se vanter. Autant dire tout de suite que si vous collectionnez pour vous et votre plaisir personnel sans arrière-pensée, VGA ne vous servira à rien. C'est clairement collection nextgen, vous savez ces collectionneurs qui deviennent nostalgiques en fonction des modes, d’ebay et des articles de la presse rétro.
A la base je suis pour le fait que l'on valorise les exemplaires en parfait état et que l'on dévalorise les exemplaires poubelles d'un même jeu rare. Sauf que là, c'est clairement un énième stratagème pour faire grimper les prix. Avec ces tocards, quand on dit qu'un jeu vaut 50$ ce ne sera plus l'exemplaire complet tbe qui vaudra ce prix, mais un exemplaire en loose lambda et VGbidule légitimera le passage de l'exemplaire tbe à >80$ et ainsi de suite. Et c'est fait de telle sorte que l'on veut redonner un statut particulier un peu comme l'est le jeu neuf face à des exemplaires occasions. Vous savez, ce statut qui fait que l'on peut mépriser et escroquer les gens, faire de fausses enchères tout ça... Evidemment, uniquement à des fins de collection, pas de spéculation bien entendu.
De même qu'il existe des opérations de reconstruction de l'hymen, quand une demoiselle qui prétend offrir sa fleur à votre auguste personne se révèle avoir déroulé des km de câble et fera preuve d'autant d'expérience qu'une actrice française nominée au César du meilleur espoir féminin, vous aurez un peu l'impression que vous avez cassé votre tirelire (dîner fin, suite présidentielle...) pour une imposture. Pas forcément désagréable au demeurant j'en conviens fort bien, mais trop cher pour le montant déboursé.
Evidemment il circule déjà des rumeurs sur des évaluations entre "bons amis" un peu trop généreuses. Billevesées que tout ceci, puisque cela n'a pas d'autre but que de nous assister dans notre passion –moyennant une bonne rétribution- et notre nostalgie du quotidien. Il n'empêche que si sur une boîte extérieure il est difficile de mentir (quoique les contrefacteurs 100% tolérés par ebay progressent sans cesse en qualité, c'est tout de même bien pratique de sceller et d'affirmer que le jeu, le manuel et les éventuels goodies sont bien présents et en parfait état quand on ne peut plus les vérifier sous peine de perdre ladite graduation. Mon bon génie vient de traiter de paranoïaque, et me rappelle que je vois le mal partout. Sérieusement, même en étant pragmatique, quid de leur indépendance quand leur expérience ne peut se justifier que via des conflits d'intérêts, à savoir leurs propres achats-ventes ?
Mon mauvais génie me suggère que chez nous, quelque part entre les boutiques honteuses et les collectionneurs rapaces se prépare un équivalent franchouillard. Si cela devait arriver, rassurez-vous, l'aspect pognon sera comme il se doit mis au centre des débats. Cocorico.
A quand une agence de notation des épiciers, crevards, mendiants et autres rapaces ?
Sans contrefaçon, ça vient du Japon
On savait depuis longtemps qu’en fonctions des titres, certaines cartouches NEOGEO (AES) qui circulaient n’étaient pas des « vraies ». Il était conseillé de ne pas acheter ces titres à risque sur ebay ou à un inconnu, mais de les acheter soi-même au Japon ou via un intermédiaire réputé. Oui, j’emploie volontairement le passé. Avant d’aller plus loin, quelques petits rappels s’imposent.
Historiquement on avait ce que l’on appelle des conversions, c’est-à-dire un jeu AES pas cher de la même famille auquel on a remplacé ses eproms par celles d’une cartouche arcade (MVS) d’un jeu très rare/cher/inexistant en AES. Le mot contrefaçon est dans ce cas un peu fort, si les 2 cartouches utilisées étant originales, tout au plus on violerait un contrat d’utilisation (vous savez les textes à valider que personne ne lit à l’installation d’un logiciel). Si lors de l’opération on réalise une jaquette et une notice là en effet, on devient un peu plus borderline.
L’avantage de l’opération étant de jouer à un jeu AES à moindre coût. L’exemple type du jeu converti est Metal Slug. Tellement que l’on sait qu’il circule bien plus de conversions que d’originaux.
Une autre famille de conversion consiste à transformer un jeu AES japonais en jeu AES américain, dans le cas très fréquent où le 2nd coûte beaucoup plus cher que le 1er. L’opération consiste à se débarrasser de la jaquette, de la notice et du sticker de la cartouche pour les remplacer par des reproductions des versions américaines. Sont concernés la plupart des titres sortis depuis la fin des années 90.
La dernière et la plus légitime consiste à « créer » une version AES d’un jeu sorti uniquement en arcade (MVS donc).
Exemples-types : Puzzle Bobble, Shock Troopers…
Bref, tant que le prix était bas et tant que l’acheteur savait qu’il faisait l’acquisition d’une cartouche AES convertie et non d’un vrai exemplaire, tout allait bien.
Avec les progrès de l’électronique grand public et du matériel mis à la disposition de tous dans les reprographies, on a vu apparaître des conversions de plus en réussies, mais aussi des copies bêtes et méchantes à la limite de la vulgarité, l’AES obtenue n’ayant pas nécessité de sacrifier une MVS, juste de faire soi-même ses eproms. Ces cartouches ne sont donc plus des conversions au sens strict du terme, même si on les désigne également de cette façon.
Dans le cas d’un titre comme Ironclad apparu il y a 18 mois uniquement sur la console virtuelle de la Wii, il n’y avait pas d’autre choix que de procéder ainsi. Surtout en Europe où la CV est en dans un 50hz des plus honteux. Par contre Neo-Ayato et Neo-Amusement n’étaient en rien obligés d’en vendre une 100aine à 400€, lors d’un tirage soi-disant limité à 100 exemplaires, en oubliant au passage de préciser l’aspect illégal de la chose bien évidemment.
J’en arrive au scandale même : lors d’une joute verbale sur Neogeofans (LE forum de référence sur SNK en France et probablement en Europe), il a été révélé qu’environ 100 ( !) exemplaires de Metal Slug convertis ont été fabriqués vers 2003 pour être revendus au Japon comme des originaux à des boutiques ou via Yahoo Auctions par un petit groupe de personnes. Montant de l’arnaque : entre 1000 et 1500€ par jeu écoulé. Les 2 principaux acteurs sont (pas de conditionnel, ils ont fini par avouer) un des gérants de Neo-Ayato et l’expatrié gérant la boutique ebay TokyoToyFactory. 2 personnes qui, malgré un passif déjà chargé et des tarifs pas des plus compétitifs, jouissaient sur NGF d’un statut de limite intouchable. On se souviendra des posts coup de gueule bien arrogants sur la liberté (sic) quand une personne osait faire la remarque que TTF enchérissait plus que de raison sur des ventes Yahoo Auctions de mr Neo-Ayato, et des cordons de sécurité « Touche pas à mon Neo-Ayato ». Le piédestal il a pris un sacré coup.
Nous apprenons au passage que l’ex-gérant de la défunte boutique parisienne Tokyo Eyes a fait la mule pour eux en amenant sur place des cartouches, 5 pas plus selon lui. Les habitués savent tout le crédit que j’accorde à la parole d’un vendeur import/oldies hexagonal.
Ont également été publiés des mails échangés entre les 2 parties tout simplement édifiants contenant des extrait du style « on le baise alors ? » ou encore « au pire ça finira à la boutique ».
Contactés dans un 1er temps en toute courtoisie via leur messagerie ebay ou celle de leur magasin, les 2 intéressés ont clairement joué au petit jeu du mépris et du déni. Il aura fallu une campagne de dénonciation des plus agressive (ebay, un paquet de fora y compris à l'international) pour avoir un début de réaction. Réaction des plus insuffisantes. D’abord, le 2e gérant de Neo-Ayato a d’abord menacé de procès en diffamation (la défunte branche lyonnaise de l’enseigne avait fait strictement la même chose par le passé). Après quelques rappels sur des casseroles historiques de l’enseigne nous avons enfin eu droit à une réponse des 2 intéressés via le webmaster de NGF (courageux mais pas téméraire les gars), avec de timides aveux, mais une absence de regret, le tout bien arrosé de la sauce « pas si grave ».
Réponse de Neo-Ayato en résumé :
- Oui on a vendu au prix fort des copies ou des conversions (ce n'est pas la même chose) de jeux AES tels que Metal Slug (et Pulstar ?), mais ce n'est pas si grave non ?
- Pourquoi revenir sur cette histoire des Ironclad pirates à 400€, le produit (aka la contrefaçon) étant magnifique ?
Mais pourquoi avoir mis plus d’une semaine à réagir et gardé le silence ? Probablement parce que ces malfaiteurs ont cru que le poisson allait comme d'habitude se noyer tout seul et qu'à part 1 vanne ou 2 de temps à autre, l'incident serait clos, et que l'on reviendrait vite à la situation précédente où ils jouissaient tous les 2 d'un certain statut. Le cas des jeux Metal Slug 2 et Pulstar a été évoqué, sans plus d’information.
Pour l’anecdote on aura aussi appris qu’un autre expatrié français « incontournable » de l’import japonais aurait fait de la prison au Japon pour vol de jeux, ce qui expliquerait son retour en France en catastrophe et la très nette baisse de qualité de son site de ventes en ligne depuis.
La suite ? En France cela ne devrait pas aller plus loin. Sur les boards américains, certains auraient abordé la question d'une plainte. Personnellement, une class action me mettrait en émoi. Il se dit que l’identité du « vrai » cerveau de l’affaire qui serait parisien (du moins à l’époque) n’a pas été révélée. De nombreuses personnes sur le forum sauraient ou auraient d’énormes doutes mais préfèreraient garder le silence pour des raisons inconnues, la moins grave étant probablement un simple copinage.
Et la réputation de la scène française à l’international ? Disons qu’elle n’en sortira pas grandie. Le fait que l’on ait dénoncé le problème prouve juste que le fruit n’est pas entièrement pourri. La belle affaire, car c’est avec effroi que l’on aura constaté qu’une fois encore, l’hexagone est toujours à la pointe de l’innovation en escroquerie. C’est que les faits ont près de 10 ans.
Ce qu'il faut en retenir:
- Que même chez le plus sérieux des revendeurs de l’archipel, un Metal Slug acheté sur place depuis 2003, sans ouvrir la cartouche, rien ne pourra prouver son authenticité. Ni le ticket de caisse d’une enseigne réputée ni l’assurance d’un expert en expertise de l’importation d’imports mode « je prends les gens de haut ». A part comparer avec un vrai (authentifié par qui ?) et ouvrir sa cartouche point de salut.
- Que c’est avant tout la faute des Japonais de se laisser ainsi avoir selon TokyoToyFactory
- Que tel un Madoff de l’AES, celui qui prétend aider les boutiques japonaises à ne pas se faire avoir est le 1er à les entuber (TTF-style).
- Que si au passage on peut mouiller sans preuve des concurrents tels qu’Akiba-Games et Gameswave, autant en profiter.
- Que plus que jamais, notre microcosme est un milieu où un peu trop d'acteurs autoproclamés incontournables se servent la soupe mutuellement. Blogueurs, "journalistes", revendeurs, collectionneurs avec expertise "incontestable" et j'en passe et autres "mules" qui se financent une partie du billet d'avion en apportant ces contrefaçons à un ami expatrié peu scrupuleux. Pour ces gens-là qui se mettent au-dessus de la mêlée, le retrogamer ou simple collectionneur est juste un pigeon à plumer qui doit, une fois encore, payer et la fermer en toutes circonstances.
- Que quand un pro poussé dans ses derniers retranchements menace de porter plainte pour diffamation il ne faut pas lâcher le morceau, il a atteint son point de Godwin. Evitez juste d’avoir un rire trop gras si le pro en question vend régulièrement de la contrefaçon qu’il a parfois lui-même fait fabriquer (plus d’autres casseroles).
- Que par ailleurs vendre des contrefaçons au prix (très) fort n’a rien de grave si elles sont « magnifiques »
- Que le bidonnage d’enchères sur Yahoo Auctions se pratique aussi. Evidemment voyons, des expatriés Français vendent là-bas.
- Que même si on sait tout ou presque de l’histoire, en mettant en avant de pathétiques excuses comme la fidélité en amitié, il faut étouffer l’affaire et éviter d’éclabousser d’autres personnes mouillées jusqu’au coup. Certains passe-droits ou autres petits arrangements historiques étant à ce prix.
Je l'écrivais il y a près de 2 ans dans d’autres circonstances, c'est plus que jamais d'actualité: bats ton revendeur imports/oldies quand tu le vois, si toi tu ne sais pas pourquoi lui il le saura.
Lot de consolation ou quand 1+1+1 = 5
Vous vous demandez pourquoi je titre au moyen d'une arithmétique si finement maîtrisée. Je termine juste cet édito sur un constat : les lots d’objets vendus plus chers qu’à l’unité. On connaissait déjà les lots avec 20 jeux dont 2 seulement sont rares et où il faut s’enquiller 18 jeux de foot surévalués, tout comme on connaît dans cette situation les acheteurs qui pensent pouvoir naïvement acquérir les 2 fameux titres en tentant la bonne vieille règle de 3.
Maintenant il faut compter avec les lots nettement plus chers que la simple addition de chacun des jeux qui les composent. Pour les rares qui tentent de se justifier on obtient des réponses surprenantes : « on économise ainsi sur le port » ou encore « c’est plus fatigant à emmener à la poste donc c’est normal» « c’est le fullset moins 53 jeux rares donc c’est le prix d’un fullset avec 0,4% en moins pour le geste».
J’ai constaté qu’il s’agissait trop souvent d’un ou plusieurs lots acquis sur Yahoo Auctions ou Leboncoin, mais expurgés des gros titres qui s’y trouvaient. Et tant qu’à faire, en essayant au passage de rembourser intégralement le prix d’achat, le port ainsi que les éventuels frais de douane. Et du bénéfice par-dessus ? Bouh les mauvaises langues.
Ça, avec les personnes qui font des topics de recherche de Eliminate Down et cie qui "privilégient l'échange" tout en n'ayant que des Altered Beast en loose à proposer...